Portrait du mois : Roland VIDAL, formateur des consciences

Roland Vidal

Formateur en élagage

Portrait de Roland Vidal

Il est parti en retraite le 27 novembre dernier, après 26 ans d’enseignement au CFPF de Châteauneuf du Rhône. Pour l’occasion, un liquidambar a été planté. C’est un pilier de notre profession qui a formé plus d’un millier de stagiaires et élèves au métier d’arboriste grimpeur. Cher Roland, toute l’équipe hévéa te remercie et te souhaite d’aller jusqu’au bout de tes rêves.

Voici le portrait de Roland Vidal, formateur des consciences

« En 1989 je rencontrais une ardéchoise. Je fis une de demande de candidature spontanée au CFPF de Châteauneuf du Rhône pour me rapprocher d’elle et quitter le plat pays pluvieux. Elle fut acceptée.

C’est au CFPF que je me mis à utiliser pour la première fois un nœud prussik avec une grosse corde. Quant au casque : bien qu’alors non obligatoire en hauteur, j’étais né avec ! … »

Je suis né à Toulon sans l’aide d’un médecin ni d’une sache-femme, mais en ayant déjà fait un nœud à mon cordon ombilical, ce qui démontre mes aptitudes précoces pour l’apprentissage. Mes parents travaillaient aux arsenaux militaires et ma mère plus particulièrement comme chimiste à l’atelier des peintures, ce qui a provoqué dans mon organisme quelques problèmes par la suite. Leurs effets n’étant pas du même genre que ceux qui ont affecté Spiderman, rien ne me prédestinait au métier que j’allais exercer…

Mon entrée à l’école se fit en hurlant sur l’épaule de l’institutrice ; j’étais donc vraiment fait pour l’enseignement !

Je pris rapidement conscience que l’espèce humaine était globalement mauvaise dans ses agissements ; aussi je préférais rêver à un monde meilleur que d’apprendre des choses qui ne m’intéressaient absolument pas, hormis la nature et le respect de la vie. Je n’ai ainsi pas en mémoire d’avoir abandonné le moindre détritus non naturel ailleurs que dans une poubelle, et cela depuis ma plus petite enfance. Suite à mes difficultés scolaires et à des accidents dus à ma maladresse (j’ai oublié de dire que je n’y vois, entre autres, que d’un œil), à 14 ans j’étais en voie de transition vers la vie active, avec l’assurance par un psy que je ne pouvais pas même suivre une formation de berger…

C’est alors qu’avec le premier courant écologiste “Terre des hommes” en 1969, je décidais de me battre pour la protection de la nature. Dans le même temps je me suis mis à pratiquer l’alpiniste pour compenser en courage ce que je n’avais pas en physique dans la pratique des sports courants.

En 1973 je fus admis, sur concours national, à entrer à l’école forestière de Meymac en Corrèze, seule école à délivrer un brevet de technicien forestier à l’époque. Mais j’y étais avec l’esprit d’un espion, pour étudier les méthodes et techniques de la filière pour éventuellement mieux les combattre. Seulement mes pensées furent détournées du seul courant écologiste, devenant plus… spirituelles. Je devins ainsi le diable pour les responsables de l’établissement alors que mon comportement se devait irréprochable.

Malgré mon diplôme acquis avec mention, il m’était donc devenu impossible de trouver un emploi dans la filière. J’ai passé quatre années à militer pour mes idées tout en faisant du bénévolat et des petits boulots, dont animateur pour enfants et adolescents en milieu montagnard. Grâce à mes compétences forestières et en alpinisme, je fis un essai dans l’entreprise d’élagage qui avait le marché de la ville de Toulon. Pour imiter les autres élagueurs et montrer mes aptitudes je me suis mis à tailler les platanes avec comme seuls équipements un casque et une sangle en bandoulière pour accrocher la tronçonneuse. Deux jours suffirent : je ne voulais pas mourir si jeune !…

Un an plus tard un ami guide de haute montagne, à la tête d’une jeune entreprise toulonnaise ayant obtenu le marché de la ville me prit pour organiser l’équipe au sol. Il chuta gravement sur l’un des premiers alignements. Je dus alors monter dans les arbres pour permettre à l’entreprise de survivre. Six mois plus tard je créais mon entreprise en association avec lui et deux autres amis. La priorité était alors de savoir grimper car nous n’avions aucune formation paysagère, et j’étais le seul à avoir des compétences forestières. Notre entreprise se monta jusqu’à dix personnes avec des moyens matériels non négligeables pour l’époque. Nos équipements de grimper provenaient des milieux de l’alpinisme et de la spéléologie (corde statique de 9 mm, poignée d’ascension comme autobloquant ou assurage depuis le sol par l’homme de pied). Nous n’avions pas de griffes, même pour les démontages, car nous ne savions pas que cela existait. La rétention se faisait déjà sur poulie, avec des techniques de base proches de celles d’aujourd’hui, la qualité du matériel et la réglementation en moins (elle n’existait pas car nous étions considérés comme des agriculteurs sans terre, prestataires de services). Notre entreprise était très innovante et reconnue pour ses règles de sécurité par la MSA. Néanmoins je fus heureux de cesser mon activité au bout de quatre années, pensant avoir réalisé les travaux les plus difficiles et y avoir… survécu ! C’était en 1984, alors que se mettait en place la première formation d’élagueur en France, au CFPF de Châteauneuf du Rhône. Durant mon activité je m’efforçais de respecter les arbres que mes clients me confiaient ; ce n’était hélas pas le cas pour mes associés.

Après un cours passage comme commis de coupe pour la plus grosse entreprise d’exploitation forestière du Sud Est, pour laquelle je devais avoir un comportement trop humain pour les équipes de bucherons, et trop respectueux pour la forêt, j’intégrais, pour ne plus la quitter, la formation professionnelle.

Je fus embauché en 1985 par la MFR de Montendre en Charente Maritime (déplacée à Chevanceau après mon départ) pour mettre en place des formations forestières scolaires et professionnelles, avec l’opportunité de monter une session de formation en élagage sur la base des techniques que je maîtrisais alors. Grâce à cet organisme je pus obtenir la qualification professionnelle me permettant d’enseigner officiellement, avec comme spécialité les formations par alternance dans l’entreprise. Je garde un très bon souvenir de cette période, avec un accueil exceptionnel.

En 1989 je rencontrais une ardéchoise. Je fis une de demande de candidature spontanée au CFPF de Châteauneuf du Rhône pour me rapprocher d’elle et quitter le plat pays pluvieux. Elle fut acceptée.

C’est au CFPF que je me mis à utiliser pour la première fois un nœud prussik avec une grosse corde. Quant au casque : bien qu’alors non obligatoire en hauteur, j’étais né avec !

Formateur en arboriculture ornementale était le métier fait pour moi, bien que peu valorisé. J’y alliais mes goûts pour l’enseignement, l’activité en hauteur, les arbres et la nature en général, et surtout le contact humain avec les stagiaires qui m’étaient confiés ainsi que les formateurs, professionnels et clients consciencieux que je n’oublierai jamais. Au-delà du seul respect des arbres j’ai essayé de faire réfléchir sur l’importante de chaque acte accompli, et au delà. Y suis-je parvenu ?

Au total près d’un millier d’élèves ou de stagiaires m’ont écouté ou subit, dont neuf cents pour le CFPF durant les 26 années que j’y ai passées.

En pré retraite depuis le mois de septembre, je me sens plus libre de paroles et d’actes pour enfin aller, si j’en ai le cœur et le courage, jusqu’au bout de mes rêves.

Un grand merci à tous !